Nadine Maudet, mère de Noelline, 32 ans : « Il faut repenser la coordination entre aidants familiaux et professionnels au profit de la personne aidée »

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Le 07/10/2020

Nadine Maudet, la maman de Noelline, 32 ans, ne s’est jamais interrogée sur le fait d’être ou non une aidante familiale. Entourée des siens, elle accompagne sa fille dans sa dynamique d’autonomie. Chaque jour qui passe est une leçon de vie où se mêle un cortège d’émotions aussi différentes que la joie, le respect des priorités de l’autre, le partage, l’inquiétude, la peur ou encore la fatigue.

Vous identifiez-vous comme aidante familiale ?
Je suis avant tout la maman d’une jeune femme de 32 ans en situation de handicap intellectuel, entourée d’une famille d’aidants. Être aidant recoupe des réalités bien distinctes, certains sont amenés à accompagner la personne aidée toute une vie et de façon continue, d’autres sont seuls pour subvenir aux besoins de la personne en situation de handicap. Être aidant est une fonction intrinsèque à notre condition humaine. Au cours de notre vie, nous serons tous, tour à tour, de futurs aidants et de futurs aidés.

Quels actes réalisez-vous au quotidien auprès de Noelline ?
Noelline dispose aujourd’hui de son appartement. Avec son activité professionnelle à mi-temps, et disposant de sa carte bancaire et de son portable, elle se définit comme une personne autonome. Si Noelline est dans une dynamique d’acquisition, elle requiert néanmoins notre soutien dans de nombreux actes du quotidien : aide au réveil, aux courses, au ménage, à la lessive ou pour être accompagnée afin de se rendre à l’ESAT. Pour se les approprier afin de mieux les reproduire, les gestes du quotidien doivent lui être nécessairement répétés. Mais être aidant n’est pas un fardeau, nous puisons dans ce rôle de vrais motifs de fierté, nous sommes admiratifs de Noelline.

Jugez-vous contraignants certains de vos choix de vie ?
Il est très compliqué de bénéficier d’un accompagnement à la hauteur du handicap de la personne.
Une fois Noelline accueillie en IME, l’idée d’accepter une mutation professionnelle ne nous a jamais effleuré l’esprit mon mari et moi. Ce qui pourrait apparaître comme une contrainte a été vécue comme un choix délibéré au profit de Noelline, engendrant de fait son épanouissement et par conséquent le nôtre.

L’accompagnement que vous dispensez a-t-il des répercussions sur votre santé ?
Noelline dispose de ses deux parents, elle est la quatrième d’une fratrie très présente. Nous ne partageons pas les mêmes réalités qu’une famille monoparentale. Noelline est engagée dans une trajectoire d’autonomie et d’autodétermination qui évolue positivement, reléguant ainsi le sentiment d’épuisement au second plan. C’est une différence majeure avec des aidants qui accompagnent des personnes âgées ou lourdement handicapées sans pouvoir être témoins d’amélioration et où la dépendance s’accentue.

Le confinement lié à la pandémie de Covid-19 a-t-il engendré de nouvelles difficultés ?
Les personnes handicapées ont payé un lourd tribut au confinement. L’accompagnement tel que Noelline le connaissait a été stoppé net. Elle ne bénéficiait plus de ses séances de kinésithérapie et d’orthophonie, de l’accompagnement des moniteurs et de la présence de ses collègues. L’interruption des interventions des professionnels a rendu l’équilibre entre les personnes en situation de handicap et les familles très précaire, et a favorisé un véritable épuisement chez ces dernières. Pour ma part, j’ai senti un essoufflement au bout d’un mois et ai dû recourir à l’aide de mes trois autres enfants.

En cette semaine de journée nationale des aidants, avez-vous un souhait à formuler pour vous et Noelline ?
Repenser la coordination entre aidants familiaux et professionnels au profit de la personne aidée aurait pour conséquence de reconnaître notre rôle indispensable, de favoriser une alliance bénéfique pour les deux parties et de rendre nos accompagnements respectifs encore plus efficaces.

Propos recueillis par Laurent Pointier

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